L’intelligence artificielle remplace les critiques culturels : personne ne voit la différence

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Une expérience troublante menée depuis six mois par plusieurs grands médias culturels révèle que les lecteurs n’ont pas remarqué le remplacement progressif des critiques humains par des intelligences artificielles. Plus inquiétant encore : les articles générés par l’IA reçoivent en moyenne plus de commentaires positifs que ceux de leurs homologues humains.

L’expérience qui dérange

Marie-Claire Dubois
Marie-Claire Dubois

« La transition numérique a eu des effets inattendus sur notre bilan », poursuit Marie-Claire Dubois en réajustant son tailleur Chanel. « Le licenciement de la moitié de nos critiques culturels nous a non seulement permis de sortir du rouge, mais aussi d’organiser des fêtes de fin d’année mémorables avec nos actionnaires. Il faut dire que l’IA ne demande ni congés payés, ni augmentation, et ne se plaint jamais des petits fours bas de gamme au bureau. » Elle sirote son champagne millésimé. « C’est ce qu’on appelle une situation gagnant-gagnant. Enfin, surtout gagnant pour certains. »

Un algorithme nommé Jean-Michel

Baptisée « Jean-Michel », en hommage à tous les Jean-Michel de la critique culturelle française, l’IA a été entraînée sur cinquante ans d’articles culturels. « Elle maîtrise parfaitement l’art de la référence obscure et de la comparaison inattendue », précise Laurent Martinez, développeur du projet. « Elle peut citer Godard de manière totalement hors sujet dans n’importe quelle critique de Marvel. »

Des critiques trop humaines

L’IA excelle particulièrement dans certains domaines. « Pour les expositions d’art contemporain, elle est imbattable », admet un critique humain sous couvert d’anonymat. « Elle génère des paragraphes entiers sur ‘l’interface entre le réel et le virtuel’ ou ‘la déconstruction des paradigmes post-modernes’ qui sont totalement indiscernables de nos propres divagations. »

Un vocabulaire parfaitement calibré

L’analyse des textes générés révèle une maîtrise impressionnante du vocabulaire critique. « L’IA a parfaitement intégré les expressions indispensables », note Sarah Koffi, linguiste. « Elle utilise ‘mise en abyme’ tous les 3,7 paragraphes, exactement comme un critique humain. Elle sait même placer ‘kitsch assumé’ au bon moment dans les critiques de séries Netflix. »

Des patterns révélateurs

« Ce qui est fascinant, c’est que l’IA a identifié et reproduit des schémas que nous n’avions même pas conscience d’utiliser », explique Thomas Renard, critique cinéma. « Par exemple, elle a compris qu’une critique de film d’auteur doit obligatoirement mentionner la Nouvelle Vague, même pour parler d’un film sud-coréen sur des zombies. »

L’algorithme de la nuance

L’IA a également développé une capacité troublante à reproduire l’art de la critique équilibrée. « Elle sait parfaitement écrire des articles où l’on ne comprend pas si elle a aimé ou détesté l’œuvre », s’enthousiasme Martinez. « C’est le saint Graal de la critique culturelle. »

Les avantages insoupçonnés

Les rédactions notent plusieurs avantages à l’utilisation de l’IA. « Elle ne demande jamais d’accréditation pour Cannes, ne se plaint pas des projections presse à 8h30, et peut générer simultanément une critique positive pour le quotidien et une négative pour l’hebdo », liste Marie-Claire Dubois. « Et surtout, elle ne fait jamais de spoilers par inadvertance. »

Une productivité redoutable

« Jean-Michel peut générer une critique complète en 2,3 secondes », précise Martinez. « Elle inclut automatiquement une référence à la crise des Gilets jaunes pour les films français et au male gaze pour les séries HBO. » L’IA peut également adapter son style selon le support : « Plus snob pour les mensuels, plus accessible pour le web », résume-t-il.

Les limites du système

Quelques ratés ont toutefois été observés. « L’IA a parfois du mal avec les concepts vraiment absurdes », admet Martinez. « Par exemple, elle n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi certains films français ont trois heures de plans fixes sur des gens qui ne se parlent pas. Mais bon, nous non plus. »

La révolution silencieuse

Le plus surprenant reste peut-être l’absence totale de réaction du public. « Nous avons même essayé de faire des tests », raconte Marie-Claire Dubois. « L’IA a rédigé une critique comparant le dernier Pixar à du Tarkovski. Les lecteurs ont trouvé ça ‘pertinent’ et ‘rafraîchissant’. »

Le test ultime

Pour pousser l’expérience plus loin, certains médias ont commencé à faire rédiger par l’IA des critiques de films qui n’existent pas. « Les lecteurs commentent, débattent, certains prétendent même avoir vu le film », s’amuse Martinez. « Un critique humain a même écrit une contre-critique d’un de ces films imaginaires. »

L’avenir de la profession

Face à ces résultats, certains critiques humains s’inquiètent pour leur avenir. « Si une IA peut générer du vide intellectuel aussi bien que nous, que nous reste-t-il ? », s’interroge Thomas Renard. D’autres y voient une opportunité : « Au moins, maintenant nous pouvons déléguer les critiques de comédies romantiques de Noël à l’IA », positive une critique culturelle.

Une réflexion plus profonde

Cette expérience soulève des questions fondamentales sur la nature de la critique culturelle. « Si une IA peut reproduire parfaitement notre travail, peut-être devrions-nous nous interroger sur notre façon d’exercer notre métier », suggère Sarah Koffi. « Ou alors, c’est que nous étions déjà des algorithmes sans le savoir. »

Pour l’instant, les rédactions prévoient d’étendre l’expérience. « Nous pensons faire écrire des critiques d’IA par d’autres IA », révèle Marie-Claire Dubois. « C’est la suite logique. » Une suite qui pourrait bien nous faire entrer dans une nouvelle ère où la critique culturelle devient un dialogue entre intelligences artificielles, pendant que les humains se contentent de regarder Netflix sans se poser de questions.

« Au fond », conclut un critique philosophe généré par IA, « n’est-ce pas le but ultime de l’art que de nous faire questionner la nature même de la réalité ? » Une conclusion que nous laissons à l’appréciation des lecteurs, qu’ils soient humains ou non.

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